Ouahigouya, Nord Region, Burkina Faso: Thanks to CERF funding, this displaced elderly man has been able to resume his goat farm. Credit: OCHA/Pierre Perron
Le Burkina Faso traverse une crise humanitaire exacerbée par l’insécurité et les impacts liés au changement climatique. Avec 2,1 millions de personnes déplacées internes (PDI) enregistrées en mars 2023 1 et les nouveaux déplacements continus après avril 2023 rapportés par les autorités régionales, 2 la situation sécuritaire reste préoccupante et affecte l’ensemble des 13 régions que compte le pays. La sévérité des besoins a sensiblement augmenté en 2023 nécessitant une réponse humanitaire adaptée en 2024. Au total 219 sur 351 communes (62 %) sont au niveau de sévérité 3 et plus selon le cadre ntersectoriel d’évaluation des besoins3. En 2024, environ 6,3 millions de personnes, soit une personne sur quatre dans le pays, a besoin d’une aide humanitaire, comparé aux 4,7 millions de personnes en 2023 (augmentation de 35 %).
En 2023, le contexte sécuritaire du Burkina Faso a continué de générer plusieurs formes de violence impactant les populations civiles. Selon les données du monitoring de protection inter agences (Projet 21), de janvier à septembre 2023, les régions les plus affectées par les incidents de protection sont le Sahel (20 %), l’Est (20 %), la Boucle du Mouhoun (17 %), le Centre-Nord (14 %), le Centre-Est (11 %) et le Nord (8 %). Parallèlement, entre le premier et le troisième trimestre 2023, le monitoring de protection inter agences a enregistré une augmentation substantielle d’incidents de protection dans les régions du Sud-Ouest (+ 667 %), dans la Boucle du Mouhoun (+ 216 %) et dans les Hauts-Bassins (+ 200 %).
Chocs
Les principaux chocs identifiés sont l’insécurité et les effets des aléas climatiques tels que les inondations, les vents violents et la sécheresse. Ces chocs sont indissociables, s'accumulent les uns aux autres, et leurs impacts se combinent pour aggraver la vulnérabilité des populations déjà en conditions humanitaires précaires. De fait, l’insécurité expose la population à une plus grande vulnérabilité, les obligeant à se déplacer. Les déplacements forcés principalement dus aux chocs sécuritaires sont de plus en plus nombreux, prolongés, multiples, et s’orientent de plus en plus vers les zones urbaines4. À cela s’ajoutent d’autres chocs, tels que les inondations et la sécheresse, qui impactent particulièrement les personnes déjà vulnérables. En effet, les PDI sont particulièrement affectées par les inondations, car ils vivent souvent dans un abri d’urgence. En 2023, entre la mi-juillet et août 2023, 24 enfants sont décédés au cours de leurs déplacements emportés par les eaux. De même, la sécheresse entraîne des conséquences sur la sécurité alimentaire et les moyens d’existence en aggravant l’accès déjà limité aux moyens de subsistance agro-pastorales. Bien que l’ampleur de ces chocs puisse être considérée comme limitée, elle devient significative lorsqu’elle est combinée aux conséquences de l’insécurité.
Impacts
La violence impactant les civils : un effet dévastateur sur les plus vulnérables. De janvier à octobre 2023, l'impact sur les civils a augmenté de 65 % par rapport à la même période de l'année 2022 (passant de 2 687 cas à 4 425 cas) 5. De plus, de janvier à octobre 2023, 142 incidents liés aux Engins Explosifs Improvisés (EEI) ont été enregistrés, entraînant 254 victimes (118 décès et 136 blessés), dont 65 % étaient des civils. La proportion de victimes civiles (statistiques annuelles) a augmenté de 36 % à 45 % entre 2019 et 2022.6
La stratégie d’isolement de la population civile s’intensifie par la destruction des infrastructures ou la pose des EEI’engins explosifs sur les voies d’accès aux communautés. L’environnement de protection des populations civiles au Burkina Faso se dégrade en raison de la persistance des chocs sécuritaires majeurs. Environ 0,8 million d’enfants sont touchés par la fermeture de 5 478 établissements scolaires, représentant 21 % de l’ensemble des structures éducatives du pays. 7 De même, 778 formations sanitaires sur 2,117 (37 %) sont fermées ou fonctionnent partiellement dans 10 des 13 régions du pays, privant près 3,6 millions de personnes d’accès aux soins de santé. Entre janvier et septembre 2023, neuf attaques directes contre les services de soins de santé ont été enregistrées, faisant deux victimes et détruisant ou volant 17 ambulances. 8 Par ailleurs, 117 formations sanitaires ont été saccagées. En 2023, 43 infrastructures d’eau ont été sabotées lors de 33 attaques entre janvier et août 2023, affectant l’accès à l’eau de plus de 144 000 personnes.9
Près de 3 millions estimées en insécurité alimentaire et nutritionnelle. Selon le Cadre Harmonisé (CH) de novembre 2023, la projection de la période de soudure annuelle (juin-août 2024) estime que près de 3 millions de personnes seraient confrontées à des situations d’insécurité alimentaire et nutritionnelle au cours de cette période, dont 425 349 personnes en phase IPC 4 [urgence]. La malnutrition aigüe met en danger la vie de plus de 1,3 millions de personnes, notamment les filles et garçons de moins de 5 ans, ainsi que les femmes enceintes et allaitantes. Dans la récente évaluation SMART Rapid menée en juin - juillet 2023, sur les 25 localités enquêtées, 22 sont dans une situation d'urgence de malnutrition aiguë globale (MAG), avec des taux de prévalence élevés et très élevés. De plus, 17 localités sur 25 enquêtées présentent une prévalence de la malnutrition aiguë sévère (MAS) supérieures à 2 %.
OUAHIGOUYA/RÉGION DU NORD
Un groupe d’apprentissage et de suivi des pratiques d’alimentation du nourrisson et du jeune enfant.
OCHA/ Pierre Peron
References
CONASUR (mars 2023)
GCORR (octobre 2023)
Joint and Intersectoral Analysis Framework (JIAF 2.0)
Dans le cadre de la coordination de la réponse rapide, il a été rapporté que 612 368 personnes nouvellement déplacées entre janvier et octobre 2023 dont 435 542 personnes (71 %) aux 10 localités dont 9 sont les chefs-lieux régionaux ou provinciaux.