Central African Republic

Central African Republic HRP 2023

Contexte et impact de la crise, conditions humanitaires et facteurs sous-jacents de la crise

Central African Republic HRP 2023
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Près des trois quarts des Centrafricains vivent sous le seuil de pauvreté dans un pays où les taux abyssaux de mortalité maternelle et infantile côtoient des proportions élevées d’analphabétisme et de mariages précoces. Alors que le pays se remettait lentement de l’impact de la COVID-19, les conséquences de la guerre en Ukraine ont pesé lourdement sur le quotidien d’une population épuisée par des affrontements armés à répétition, accompagnés de graves violations des droits de l’homme. Sur une population de 6,1 millions de personnes, plus de la moitié, soit 3,4 millions, ont besoin d’une aide humanitaire.

Des taux de mortalité infantile et maternelle parmi les plus élevés au monde. Le taux de mortalité infantile est le cinquième plus élevé au monde, avec 103 décès pour 1 000 enfants avant l’âge de cinq ans1 . Le taux de mortalité maternelle est également le cinquième plus élevé au monde avec 829 décès pour 100 000 naissances vivantes2 . La pauvreté, qui touche 79% des femmes contre 67% d’hommes, est un facteur supplémentaire de vulnérabilité3 .

Moins éduquées et plus pauvres que les hommes, les jeunes filles subissent davantage les mariages précoces. Quelque 5% des jeunes hommes âgés de 20 à 24 ans ont été mariés avant l’âge de 15 ans, proportion qui atteint 26% chez les jeunes filles4 . Le lien entre déscolarisation et mariage précoce est bien établi puisque seuls 17% des femmes mariées avant 15 ans sont alphabétisées tandis que 58% des femmes qui n’ont pas subi de mariage précoce le sont.5

Les personnes handicapées constituent une catégorie de population particulièrement exposée aux discriminations. 31% des personnes handicapées interrogées expliquent faire face à des situations de discrimination liées à leur handicap6 . Souvent exclus des systèmes éducatifs, les enfants handicapés en âge d’être scolarisés vivant dans un contexte de crise n’ont quasiment pas accès aux salles de classe. En RCA, 73,8% des personnes handicapées interrogées ne savent pas lire et écrire7 .

Reconquête des villes et affaiblissement des groupes armés. Un an après le regain de violence accompagnant les élections présidentielles de décembre 2020 et la formation d’une coalition de groupes armés, les Forces Armées Centrafricaines (FACA) appuyées par les autres personnels de sécurité (APS) ont solidifié leur contrôle des grands centres urbains tels que Bria, Bambari, Bouar, Kaga Bandoro et Bocaranga.

Retranchés dans la brousse et autour de carrés miniers artisanaux et opérant autour de chaînes de commandement très localisées, ces groupes armés fonctionnent désormais comme des bandes criminelles. Leur capacité de nuisance reste importante sur les axes routiers et dans les villages où ils se livrent à des braquages, pillages, des taxations illégales, extorsions de biens et commettent un niveau élevé de violence à l’encontre de la population civile, et particulièrement les violences sexuelles et basées sur le genre.

Près de 500 000 personnes n’ont pas encore pris le chemin du retour8. Si ce chiffre traduit une baisse de 26% du nombre de personnes déplacées internes (PDI) par rapport au mois d’août 2022, il est à mettre au compte de l’extension de la couverture de la Matrice de suivi des déplacements (DTM) de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Car loin de traduire une amélioration du contexte, l’analyse des données faite par OIM/DTM montre qu’un tiers des retours s’est produit entre 2018 et 2019 tandis que seuls 9% des retours ont eu lieu en 20229 . Pire encore, près du quart de l’ensemble des PDI comptabilisés dans le pays s’est déplacé en 202210 en raison des conflits armés, des inondations ou pour retrouver leur communauté d’origine.

Des inondations qui surpassent celles de 2019. Depuis juin 2022, les inondations en RCA ont affecté environ 103 000 personnes dans 12 des 16 préfectures que compte le pays, détruit plus de 5 000 maisons et 19 500 hectares de cultures, endommagé de nombreuses infrastructures et déplacé plus de 6 000 personnes. La Préfecture de la Vakaga, dans le nord, a été la plus touchée (24 000 sinistrés), suivie de la capitale Bangui (20 400) et de la Préfecture de l'Ouham (13 000). Fin octobre, sept écoles étaient encore occupées par les personnes sinistrées, compromettant la rentrée scolaire 2022-2023 de plus de 10 000 enfants.

La tendance à la hausse des cas déclarés de violences basées sur le genre s'est poursuivie tout au long de l’année. Plus de 17 831 cas de VBG ont été rapportés entre janvier et septembre 2022, dépassant de 53% le nombre total de cas signalés en 202111. Cette augmentation s’explique en partie par l'expansion des interventions VBG dans de nouvelles zones mais également par la persistance des conflits armés, l'autorité limitée de l'État et l'insécurité alimentaire.

Une augmentation de 8% des violations et atteintes aux droits de l’homme. Les violations et atteintes commises dans le cadre des opérations militaires, y compris celles impliquant les autres personnels de sécurité (APS), parfois appuyés par des milices supplétives sont particulièrement préoccupantes. Ces milices ont été recrutées, entraînées, armées et/ou soutenues logistiquement pour mener des attaques contre des civils.

**Utilisés, recrutés ou privés de leur droit à l’éducation, les enfants centrafricains subissent des violations graves de leurs droits. Selon la Division des droits de l’homme (DDH), un grand nombre d'enfants continue d’être recrutés et utilisés aussi bien par les forces nationales que par les groupes armés. De janvier à août 2022, la DDH a documenté et vérifié plus de 29212 cas d’utilisation et de recrutement d’enfants ; soit plus d’un enfant utilisé ou recruté par jour en RCA.

La République centrafricaine a été particulièrement exposée aux conséquences de la guerre en Ukraine. Pays enclavé avec une faible production interne, la RCA dépend de pays voisins pour l'importation de biens de consommation, qui à leur tour sont fortement dépendants de la Russie et de l'Ukraine pour l'importation de produits comme le blé, l'huile et les engrais. Le prix de la farine de blé, du riz et de l'huile végétale a connu une augmentation en moyenne de 30%, 20 % et 56% respectivement sur les marchés centrafricains.13 Au cours du premier semestre 2022, la rupture complète et répétée de certains aliments a été signalée à plusieurs reprises, comme le maïs en grains, le riz, le manioc, le haricot et la viande.

Depuis le mois de mars 2022, le pays fait face à des ruptures prolongées dans l'approvisionnement en carburant, conséquence directe des perturbations des exportations de pétrole russe. La vente au marché noir a explosé dans les rues de Bangui, tout comme le prix du litre d’essence vendu jusqu’à 1 500 FCFA contre 850 FCFA à la pompe. Des augmentations similaires ont été observées sur l'ensemble du territoire.

La forte dépendance des structures de santé au carburant a fortement limité leur fonctionnement. Seuls 8% des hôpitaux sur l’ensemble du territoire ont accès à l'électricité. La forte dépendance au carburant pour faire fonctionner les générateurs, transporter et conserver les médicaments a limité la disponibilité des services de santé.

Augmentation du coût financier des opérations humanitaires. La perturbation des chaînes d'approvisionnement, l'augmentation de 40% du prix des médicaments, des céréales et du carburant sur le marché mondial ont entraîné une hausse des budgets nécessaires aux opérations humanitaires.

Une hausse sans précédent des prix sur les marchés. Les marchés centrafricains ont toujours connu une importante variabilité des prix au cours de l'année et selon les régions. L'impact de la guerre en Ukraine et les perturbations de la chaîne d'approvisionnement qui en ont résulté ainsi que les restrictions à l'exportation du Cameroun ont toutefois fait grimper les prix au-dessus des niveaux observés pendant la pandémie de la COVID-19.

L'augmentation des prix sur les marchés mondiaux n'est pas la seule pression financière à laquelle les partenaires humanitaires en RCA risquent d'être confrontés en 2023. Afin de contrer le déficit budgétaire du gouvernement, le budget adapté pour 2022 a imposé des coupes budgétaires à plusieurs ministères tels que la santé, l'agriculture ou le genre.

Pour plus de détails sur les besoins, conditions humanitaires et facteurs sous-jacents de la crise voir l’Aperçu des besoins humanitaires (HNO) à l’adresse suivante : bit.ly/HNO2023